LES CADRANS SOLAIRES |
Bref
aperçu sur leur origine et leur disparition.
Il
est vraisemblable que de la constatation du retour des saisons, naquit la
première unité de temps réellement perçue par les hommes, devant naturellement
modifier leur façon de vivre au fil de l'année.
L'observation
du mouvement des étoiles fut rapidement liée aux semailles, activité
essentielle de leur existence, mais certains observateurs allèrent plus loin,
ils construisirent des repères terrestres de la position des astres.
Ces
premières constructions monumentales sont en fait des calendriers géants,
alignements étranges de pierres dressées avec une précision exceptionnelle
comme à Stonehenge en Grande-Bretagne à l'âge du bronze (vers -1900 à -1600) et
en Gambie au début de l'âge du fer (vers -1100), des pyramides en Egypte et en
Amérique du sud, des assemblages architecturaux divers en Chine, Inde, Iran.
Chaque région du globe peut montrer son calendrier monumental des origines,
mais il semble que les zones tropicales soient les mieux pourvues.
L'année
donc, est la première unité, rapidement divisée en 12 lunaisons, mais le compte
n'y est pas, aussi les civilisations vont-elles choisir, l'une le soleil,
l'autre la lune et finalement toutes élaboreront des calendriers luni-solaires
de précision variable suivant la qualité du raisonnement mathématique de leur
astronome ; les Aztèques ont créé un calendrier très complexe, impressionnant
de précision et de longévité.
Généralement
l'année solaire est divisée en 12 mois, plus quelques jours de rattrapage pour
faire le compte. Fatalement le nycthémère (une rotation de la terre sur
elle-même) est lui aussi divisé. Il semble que ce soit les Sumériens (Iran) qui
divisèrent en 6 (chiffre important dans leur numération) le jour ainsi que la
nuit, il y avait donc 12 heures par rotation terrestre, à l'image des 12 mois
de l'année.
On
peut imaginer que le mouvement journalier de l'ombre d'un arbre ou d'un édicule
intrigua plus d'un observateur et engendra le cadran solaire.
Les
premiers gnomons (en grec : bâton ou indicateur, selon les traducteurs) sont
plantés verticalement. Le long d'un jour ensoleillé, nécessairement, l'ombre
varie en longueur et en direction simultanément, variations difficilement
assimilables, d'autant que d'un jour à l'autre les longueurs sont différentes
pour une même heure ! Cela donna lieu à l'établissement de tables, donnant
l'heure en fonction de la longueur de l'ombre mesurée en pied car, dans les
régions tropicales la variation de longueur de l'ombre est plus visible que sa
variation angulaire. A cette époque, on ne recherchait pas une division
uniforme du jour mais surtout des repères communs à un groupe pour décider,
prier. Ces gnomons sont les obélisques, les colonnes de pierre ou en fer.
Vers
-1000 à -800, en Egypte apparaît le premier cadran portable, en bois.
A
partir de ce moment, l'évolution du cadran se fera à vitesse variable, suivant
l'intérêt des civilisations pour l'observation du ciel et les mathématiques.
Plus
près de nous, c'est en Grèce vers -560 qu'Anaximandre de Millet, disciple de
Thalès, introduit l'usage du gnomon vertical. Mais pour la nuit, on avait
recours à la clepsydre (en grec : dérober l'eau) qui était depuis longtemps
utilisée en Chine, Egypte..
Mais
Rome n'est pas en reste, en -263, est ramené de Catane en Sicile, le premier
cadran "romain" connu, c'est un scaphe, cadran hémisphérique creux.
On s'aperçut 99 ans plus tard qu'il n'était pas adapté au lieu ! Les musées
européens détiennent de beaux exemplaires de bons cadrans romains.
C'est
en Angleterre que débute le mouvement intellectuel en Europe, en 670 (église de
Bewcastle) premier cadran vertical divisé en 12, puis à Reims vers l'an 1000.
L'Europe
des hautes latitudes ne connaît vraiment les cadrans solaires que grâce aux
byzantins qui avaient fuit en Italie, relayés par les Arabes Fatimides
transitant par l'Espagne jusqu'à la France du Xième siècle. Le style (ou
gnomon) est horizontal, comme pour beaucoup de cadrans de hauteur mais la
division est imparfaite, d'ailleurs, il ne divise toujours pas le temps mais
indique le plus souvent une succession de prières qui sont : matines ou mannes
(devenues plus tard prime) à l'heure du lever du soleil ; tierce, au milieu de
la matinée ; sexte, à midi ; none au milieu de l'après-midi et enfin les vêpres
au coucher du soleil. En 1040, on note l'apparition du cadran de berger (cadran
de hauteur), sans doute un reste des cadrans de basses latitudes. Ces petits
cadrans de poche étaient encore fabriqués à la fin du XIXème siècle dans les
Pyrénées.
Mais
ces cadrans canoniaux (cadrans semi-circulaires avec le gnomon horizontal)
surtout propres aux églises, ne donnent pas satisfaction quand il faut diviser
également le temps. C'est après les croisades qu'apparaît en Europe le cadran
solaire avec le style parallèle à l'axe de la terre, c'est à dire, dirigé vers
le pôle (le porteur d'ombre horizontal ou vertical était le gnomon, il devient
le style depuis qu'il est incliné) cette nouvelle pratique révolutionne la
gnomonique européenne et est à la base de nos cadrans actuels. L'essor de la
gnomonique à la renaissance se traduira par une multitude de cadrans
horizontaux et verticaux traditionnels, des découvertes comme le cadran
analemmatique dans lequel l'homme utilise son ombre pour connaître l'heure sur
une ellipse dessinée sur le sol. L'algèbre, l'arithmétique et la géométrie se
développent, de nombreux livres sont publiés, en latin puis en français,
anglais, allemand, les traductions et les gens circulent, la Révocation de
l'Edit de Nantes y fait pour beaucoup, les connaissances migrent et les centres
principaux de fabrication se déplacent. Avec les voyages, les cadrans portables
font leur apparition, ces derniers font la plus grande part des collections
publiques ou privées.
Le
XVIIème siècle voit l'âge d'or de la gnomonique, les inventeurs font des
prouesses techniques, utilisant l'optique et la chaleur comme dans le cadran
pour aveugles de Jacques Ozanam, le magnétisme avec les cadrans de Bloud,
ivoirier Dieppois car à cette époque, pour une partie de l'Europe, les nords
magnétique et géographique sont confondus.
Au
XVIIIème siècle, les garde-temps (ancêtres de nos montres) manquent de
vigilance et perdent parfois plusieurs dizaines de minutes par jour aussi
a-t-on recours à la méridienne - grand cadran solaire de précision n'indiquant
le temps que vers midi - pour régler ces mécanismes vagabonds. Ce sera là leur
dernier grand service pour le temps car les techniques de mesure de
l'écoulement du temps vont changer, la transmission par radio va mettre à la
portée de tout à chacun la connaissance de l'heure nous permettant ainsi de
remettre à l'heure nos montres à quartz.
Bien
qu'étant devenu obsolète, le cadran solaire reste un art décoratif agréable,
une curiosité scientifique (des cadrans ont été inventés au XXème siècle) à
redécouvrir, il suffit de constater l'intérêt à ce mode de communication local
de temps, ne serait-ce qu'à travers du dernier cadran monumental construit en
1992/1993, la Nef Solaire sur l'aire de Tavel, autoroute A9 à 15km d'Orange,
haute de 17m, pesant 600t, témoin moderne de méthodes archaïques, elle abrite
un historique illustré et une muséographie sur les cadrans solaires et le
temps.
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